Article rédigé par Jean-Marc Jancovici et publié sur manicore.com en juin 2001.
Il est assez courant d’assimiler écologistes et amoureux de la nature, ou tout du moins de considérer que tout amoureux de la nature est nécessairement un écologiste. Les choses sont-elles si évidentes ?
Tout le monde sait ce qu’est un amoureux de la nature. Il se sent bien dans une forêt, sur une montagne, sur les flots, et plus généralement « loin de la civilisation ». Il recherche généralement ce contact fréquemment, ce qui peut aller jusqu’à en faire un cadre de vie au quotidien. Il est généralement désireux de préserver les sites « naturels » en l’état, au moins ceux qui sont dans son entourage immédiat.
Définir ce qu’est un écologiste est probablement plus ardu, car la définition varie en fonction de celui qui la donne !
– Pour les industriels, est volontiers « écologiste » celui qui se plaint des nuisances de leurs activités,
– Pour les agriculteurs, est « écologiste » celui qui réclame du bio,
– Pour la Direction des Routes, l’écologiste est un adepte du vélo…
L’écologiste est donc tout autant défini comme un « anti » que comme un « pro » (pro-nature, pro-autre chose). Et pour achever d’ajouter à la confusion, pour un journaliste est tout simplement écologiste celui qui s’autoproclame comme tel, le plus souvent sous couvert d’une étiquette « officielle », ce qui laisse de la marge de manoeuvre ! Pour la presse (et donc généralement pour le grand public), pour être écologiste il suffit d’être un membre du parti Vert, ou d’une association dont la défense de l’environnement fait partie des objectifs déclarés, même si les actes ou les idées dudit membre, appliquées à quelques milliards d’être humains, ne seraient en rien compatibles avec la préservation d’une planète dans le meilleur état possible (les contradictions ne sont pas rares…).
Et qu’en dit le dictionnaire ? Hachette en propose la définition suivante : « Écologiste : personne attachée à la protection de la nature et des équilibres biologiques ».
Si l’on prend cette définition comme base, alors est écologiste celui qui cherche à perturber le moins possible les grands équilibres naturels, ou à minimiser sa pression sur l’environnement. Est-ce en étant amoureux de la nature que l’on y arrive ? Pas nécessairement, comme on va le voir.
Supposons que je sois un habitant de zone urbaine, ce qui est le cas de 80% de la population (source INSEE). En ville, on ne peut pas dire que la « nature » soit très présente. Si je suis un amoureux de la nature résidant dans un pôle urbain je vais donc, pour assouvir ma passion, me déplacer pendant mes loisirs, voire pendant mon travail, pour trouver des milieux encore peu fréquentés par l’homme.
Par exemple, je vais aller me promener le Dimanche à 30 km de chez moi. Très probablement, je vais y aller en voiture, ce qui va engendrer des nuisances pour l’environnement, comme tout déplacement en voiture ! Si nous sommes suffisamment nombreux à aller nous promener le Dimanche en voiture, cela donne ce qui suit, que l’on ne peut pas précisément qualifier de « minimisation de la pression sur l’environnement ».